L’ÉGLISE SAINT-PIERRE SAINTE-BARBE DE SAINT-CHAMOND de 1609 à 2017 -



L’EGLISE SAINT-PIERRE SAINTE-BARBE DE SAINT-CHAMOND

 

 

C'est au XIlIe siècle que, pour la première fois, mention est faite dans les suffragants de l'abbaye d'Ainay d'une église paroissiale Saint-Pierre distincte de l'église Saint-Ennemond. Le choix du titulaire de l'église est dû vraisemblablement à l'influence du fameux monastère de Saint-Pierre-des-Terreaux, reconstitué et protégé par saint Ennemond.

L'église Saint-Pierre était alors bâtie sur la colline qui domine au Nord la ville, à l'intersection des rues actuelles des Capucins et Mondragon. C'était la paroisse du château : les seigneurs y possédaient une chapelle dédiée à sainte Anne et saint Georges et dans cette chapelle leurs tombeaux.

Lors des guerres de religion, en 1562, Christophe de Saint-Chamond décida d'étendre et de compléter les défenses de son château : l'église qui se trouvait à proximité des fortifications fut donc condamnée à disparaître. C'est bien à regret que le seigneur prit une telle décision et il s'engagea solennellement à la reconstruire sur la rive droite du Gier : cet emplacement semblait en effet mieux choisi, plus facile d'accès et plus central pour les nouveaux quartiers qui se développaient précisément sur cette rive.

Christophe de Saint-Chamond, ni son gendre Jacques de Miolans ne purent tenir leur promesse : pendant près de 50 ans les paroissiens de Saint-Pierre se réunirent soit sous les halles (la grenette) de la ville (aujourd'hui place de la Halle), soit dans la chapelle Sainte-Barbe, construite vers 1480 en bordure du Gier par Mathieu Palerne, marchand, sur le territoire du prieuré de Saint-Julien.

Enfin MELCHIOR MITTE DE CHEVRIERES réalisa le vœu de son grand-père. Après en avoir sollicité l'autorisation des Pères Jésuites du collège de la Trinité à Lyon, commendataires du prieuré de Saint-Julien, il construisit dans le prolongement de la chapelle Sainte-Barbe — qui devenait le chœur de la nouvelle église — une nef aux vastes proportions, flanquée de part et d'autre de chapelles et plafonnée à caissons, dans le style de la Renaissance italienne. Le choix de ce style par le jeune seigneur de Saint-Chamond s'explique aisément : Melchior, après ses études classiques au collège des Jésuites d'Avignon, s'était rendu à Rome pour s'y former à l'étude des lettres et des auteurs sacrés, il devait y retourner plusieurs fois comme ambassadeur du Roi : de ses séjours en Italie il dut rapporter une prédilection pour ce style à la fois simple et somptueux, « rené » des basiliques païennes.

Peut-être remploya-t-on dans la construction de la nouvelle église quelques matériaux ayant appartenu à l'ancienne, notamment les pier­res et les colonnes du portail, et certains chapiteaux ou ecussons que l'on découvre dans les chapelles et qui semblent bien antérieurs aux XVMme siècle.

En un an le travail fut achevé et l'église « consacrée et dédiée au Bienheureux saint Pierre, prince des apôtres, le 3 mai 1609, par Révérend en Dieu Messire Jean Fabes, archevêque de Tara et suffragant de Vienne, en l'absence et avec la permission de Monseigneur l'Archevêque de Lyon ».

L'année suivante elle devenait église collégiale : le seigneur de Saint-Chamond y fondait en effet un chapitre de chanoines qui devait assurer la prière officielle : ce chapitre se composa d'abord d'un doyen (Pierre Peyrouse), de cinq chanoines et de quatre novices ; il comptait en 1619 dix chanoines ; il cessa d'exister en 1634, date de la fondation et de la dotation de la collégiale Saint-Jean-Baptiste.

Le clocher, commencé en 1617, ne fut terminé qu'en 1645, et le bourdon — qui porte le nom de Melchior — fondu en 1646. La façade, dans son état actuel moins les portes, date de 1655.

Si l'on compare les délais de construction de la nef (1608-1609) et du clocher (1617-1645), on n'est pas étonné de constater que le second ait traversé trois siècles sans réfections de structure, alors que la nef nécessitait, soixante ans seulement après son élévation, des réparations aussi importantes qu'urgentes. Un rapport d'experts en date du 18 juillet 1673 précise les travaux à exécuter tant pour la consolidation que pour l'embellissement de l'église. Il a sa place dans cette notice (du moins en résumé), car il permet de se faire une idée de ce qu'était la toute première église en bordure du Gier.

Voici la liste des différents travaux jugés nécessaires ou simplement convenables : « élever le sol de la nef de 3 pieds (1 m.) et celui du chœur de 2 pieds (65 cm) au-dessus du sol de la nef ; — refaire à neuf la muraille du côté bise (Nord) à cause de la caducité et du danger de l'eau qui a en partie démoli le mur des chapelles dudit côté et relever de 6 pieds (2 m.), rehausser aussi de 6 pieds la muraille côté vent (Sud) ; — remplacer les œils-de-bœuf par des verriaux (vitraux) de même grandeur que ceux des chapelles ; — abattre les deux grands piliers de pierre de taille qui sont au milieu de la nef ; — le chœur étant partagé en deux parties voûtées l'une en triangle, l'autre en carré, n'en faire qu'un et le rendre régulier ; — élever le sol des six chapelles côté vent, de même pour les trois chapelles côté bise ; — faire de la chapelle abandonnée maintenant par les Pénitents (qui en ont fait construire une en dehors) trois chapelles en posant trois arcades, les murs et verriaux nécessaires, ce qui fera de chaque côté un nombre égal de chapelles et grandira de beaucoup la nef de l'église ; — refaire à neuf le couvert (charpente) et les lambris de la nef, en péril imminent de leur ruine ; — poser côtés vent (place) et soir (façade), pour l'ornement de l'église, des créneaux en pierre de taille avec des gargouilles et au-dessus du portail une croix et deux pyramides ; — reblanchir le dedans et le dehors ; — changer les vitres presque toutes cassées ».

La première église Saint-Pierre nous est ainsi décrite : la nef est basse et sombre, partagée par deux grands piliers ; sur cette nef sont ouvertes à droite six chapelles, à gauche et près du chœur trois chapelles ; un mur aveugle la chapelle des Pénitents (qui occupait l'emplacement des trois chapelles de gauche les plus proches de l'entrée) ; le chœur (l'ancienne chapelle Sainte-Barbe) de style gothique est composé de deux parties inégales et disparates.

Tous les travaux indiqués dans le rapport des experts furent-ils exécutés? Les quittances conservées à ce jour ne permettent de l'affirmer que pour l'exhaussement des murailles, l'exécution des vitraux, la division de la chapelle des Pénitents en trois chapelles et la réfection de la charpente (7 pièces de bois de 18 m de long achetées à la Valla et une certaine quantité de bois de charpente à Doizieu).

De la même époque (1675) datent probablement le plafond exécuté ou remis en état par Claude Mercier, maître menuisier à Saint-Chamond et certainement les portes en chêne de la façade, du même auteur.

On trouve encore dans les comptes paroissiaux les factures d'un tabernacle avec onze figures dorées (Parizot, sculpteur à Lyon, 1676), d'un retable en bois doré (Régnier, sculpteur à Lyon, 1677) et d'une chaire à prêcher (Mercier, menuisier à Saint-Chamond, 1684). Nous n'avons aucune indication sur la destination ultérieure de ces différents objets.

 

Trois quarts de siècle passèrent, sans histoire connue.

 

En 1753 un vaste projet fut mis à exécution, la construction d'un nouveau chœur (Caresty, architecte) : la vénérable chapelle Sainte-Barbe fut donc démolie. La première pierre fut posée le 26 février 1753, et le 1er novembre 1754 avait lieu la bénédiction du chœur et du maître autel par Messire Brachet, curé de Saint-Paul-en-Jarez et archiprêtre de Saint-Etienne.

Pourquoi l'architecte éleva-t-il si haut ce chœur, qu'il fallut, pour le souder au plafond de la nef, faire un raccord à la vérité fort disgracieux ? Peut-être rêvait-il de substituer plus tard au plafond de la nef une voûte qui aurait prolongé celle du chœur. C'eût été regrettable. Le gros œuvre achevé, restait à le meubler, et ce furent les superbes boiseries et les tableaux que nous étudierons plus loin. Le dernier tableau était livré à la veille de la Révolution Française (octobre 1788).

En 1793, le curé assermenté fit refaire le pavement de l'église. Ici une courte digression historique n'est peut-être pas inutile. Avant la Révolution les principales familles possédaient un caveau dans l'église même : chaque caveau, appelé « vas », était fermé par une pierre portant soit une inscription, soit simplement un chiffre ; le banc de la famille se trouvait au-dessus de son caveau. A la mort du propriétaire, ses héritiers devaient verser une certaine somme à la marguillerie pour racheter l'un et l'autre : c'est ce qu'on appelait la « reconnaissance de son vas et de son banc ». On pouvait aussi, par l'entremise de la marguillerie, « augmenter » sa place ou la vendre. Après l'ouverture, en 1792, « au pré des Minimes » (à l'emplacement du square et du groupe scolaire Lamartine), d'un nouveau cimetière, on dut procéder à l'exhumation des corps inhumés dans l'église. Les pierres qui recouvraient les caveaux furent traitées comme de simples matériaux : on dut les enlever, puis les disposer sans ordre, les taillant au hasard : c'est ce qui explique que l'on trouve sur les dalles des chiffres, des initiales et des écussons tournés en tous sens. Une seule condition était consignée dans le devis : « que toutes les pierres se trouvent dans un parfait niveau » et convenablement jointes.

C'est à M. DERVIEUX, le premier curé après la Révolution (1803-1832), que revint la charge de relever la paroisse et son église : celle-ci devient alors un vaste chantier où l'on repeint, restaure, redore. Du début du XIXe siècle datent aussi la chaire, la croix qui couronne le clocher (1806) et les deux tables de communion.

M. THIOLLIERE DU TREUIL, qui fut curé de Saint-Pierre de 1832 à 1845, consacra à l'embellissement de son église des sommes considérables. A peine installé (1832) il fait recouvrir le dôme du clocher de plaques de cuivre, qui ont pris depuis cette teinte vert-de-grisée si caractéristique. En 1835 il fait exécuter par Prost, sculpteur à Lyon, un parquet de marbres polychromes pour le sanctuaire. En 1837 il entreprend de grands travaux qui seront dirigés par les architectes Perret et Gros de Lyon : leur but est de « donner à la nef de l'église un caractère plus architectural et de rendre les chapelles symétriques ». En même temps il fait construire l'autel et le retable de la chapelle des Saintes Reliques, la tribune, et paie de ses deniers les orgues. Enfin en 1841 il fait installer l'éclairage au gaz.

Puis vient M. BESSON (1845-1880). Son nom reste surtout attaché à la fondation d'une école cléricale longtemps florissante, mais l'église paroissiale lui doit aussi beaucoup. Des deux chapelles de gauche les plus proches du chœur, il n'en fit qu'une qu'il consacra à la Sainte Vierge et fit orner somptueusement; il installa le grand Crucifix dans la plus haute chapelle de droite et affecta à saint Joseph l'ancienne chapelle de la Vierge. Ces différents travaux, dirigés par l'architecte Bossan, datent des environs de 1850. Une forte somme fut consacrée en 1852 à la réfection de seize tableaux, travail confié à François David, artiste peintre à Lyon, et en 1864 à la remise en état des chapelles de droite. Les vitraux en grisaille du chœur, de la tribune et de quatre chapelles sont aussi de 1864 (Barrelon, peintre-verrier à Grigny). En 1867 était installé le premier calorifère.

M. BOUVARD succéda à M. Besson en 1880. En 1886, il fit restaurer la chapelle du Sacré-Cœur. De 1890 à 1893 ce furent la réfection de la charpente, l'installation d'un calorifère à air chaud et surtout la décoration de toute l'église (nef et chapelles, moins celle du Sacré-Cœur} par le peintre lyonnais Dettanger. En 1899 le clocher était recrépi, une horloge à deux cadrans installée, la croix redressée, le coq remplacé (l'ancien est conservé au musée de la Grand-Grange avec !es quatre gargouilles qui ornaient les angles du clocher). A la fin de l'année, de grandes fêtes solennisèrent les noces d'or sacerdotales de M. Bouvard : le cadeau de la paroisse à son pasteur fut le rajeunissement des grandes orgues ; l'inauguration de l'instrument, relevé par la maison Michel-Merklïn, eut lieu le 25 mars 1900.

Les principaux travaux au XXe siècle furent, sous le rectorat de M. PONSONNARD (1909-1918), l'érection de deux statues, l'une de Jeanne d'Arc (1910), l'autre du Curé d'Ars (1912) et sous celui de M. MANIN (1918-1936), la construction d'un monument aux morts de la guerre (Dumas, sculpteur, 1919), l'installation de l'éclairage électrique (1926), la réfection des vitraux (1928), l'aménagement de la chapelle de Sainte-Thérèse de l'Enfant-Jésus (1930), le relevage des orgues (1931) et l'électrification des cloches (1934).

Enfin, en 1939, à l'occasion du 25me anniversaire de l'ordination de M. DANDEL, la paroisse offrit la restauration de la chapelle de Notre-Dame de Tout-Pouvoir.

                                                                                                                      Mgr  Joseph Sapin (+)



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-restauration par des artistes- 2017-